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Les années creuses du nationalisme marocain: des réseaux locaux au réseau national

Cette présentation s’articule  autour de 3 points:

 Je  reviendrai d’abord sur la construction de mon objet d’étude ; ensuite sur quelques résultats; et enfin je présenterai quelques pistes et éventuelles perspectives derecherche telles que dégagées de ce travail.

Construction de l’objet de recherche:

outrouhat_13.3Cette thèse porte sur l’étude des processus de l’émergence du nationalisme marocain durant les années 1920. J’ai abordé la question de l’émergence de ce nationalisme en termes de réseaux sociaux en me focalisant sur les réseaux d’acteurs locaux et en décrivant la fusion de ces réseaux locaux en un réseau national.

A travers l’identification et la description des réseaux d’acteurs locaux, c’est-à-dire au niveau de chaque ville étudiée, j’analyse ce passage du local au national et les processus de la fusion de ces réseaux locaux en un réseau national. En prenant la ville comme entrée, il m’a été possible de saisir ces réseaux locaux et les actions et espaces autour desquels ils se sont étoffés et de mieux décrire les cheminements de ces noyaux urbains vers la formation d’une organisation collective au niveau national. Au-delà, la description de ces articulations du local et du national – jeux d’échelles – m’a amenée à poser et à tenter de répondre à cette question principale: Que retient-on du local dans la construction du national? – c’est-à-dire au niveau de la construction discursive de la nation.

Pour exposer les résultats de cette étude, j’ai construit mon plan ainsi:

Chapitre préliminaire, une typologie des réactions des Marocains face au fait colonial: le but de chapitre était, en plus de la construction de la typologie et déconstruire la réaction telle que communément admise comme «résistance versus collaboration»; c’était la solution que j’avais trouvé pour présenter «le contexte», pour revisiter la toile de fond et surtout pour asseoir les processus que je décris par la suite. Ce chapitre m’a le plus donné à réfléchir et c’est la partie que j’ai le plus partagée avec mes pairs que je remercie beaucoup pour leurs remarques pertinentes.

:Après ce chapitre, le texte se construit en deux parties qui suivent mon hypothèse du passage du local au national

Une première partie porte sur l’identification des réseaux locaux des différentes villes étudiées: Tétouan, Fès, Rabat, Salé et Tanger : petites monographies couvrant les trois zones de statuts de dépendance. Il s’agit d’insister sur le cadre dispersé et local des réseaux d’acteurs et de leurs revendications.

Une seconde partie décrit et analyse la logique des connexions entre les réseaux locaux et leur fusion en un réseau national, à savoir la création d’une organisation englobant les nationalistes de ces différentes villes en 1930. J’ai, au passage, également re-questionné la catégorie de «jeunesse» à partir de deux textes que j’ai restitué à l’occasion (un texte de Moukhtar Soussi et un d’Abdelhafid el Fassi).

Tel que présenté, l’objet de ma recherche semble clair précis et circonscrit. Néanmoins, il ne l’a pas été depuis le début. A l’instar des processus que je décris dans ce travail et dont je dis qu’ils sont complexes, non linéaires et traversés par des tâtonnements, tel est le processus de cette recherche. Le produit final est totalement différent du projet de départ. L’ambition du départ après mon travail de DESA qui avait porté sur les réseaux nationalistes de Tétouan, avait été de reconduire la même méthode et de la généraliser au niveau de toutes les villes et plus encore de couvrir toute la période du protectorat. L’ambition était grande de pouvoir restituer la configuration totale du réseau complet des nationalistes, comme le stipule les différents courants de l’analyse de Réseaux sociaux avec ses modèles mathématiques complexes, graphes qui me fascinaient à l’époque.

Mais la question que je n’arrêtais pas de me poser, et qui est assez partagée par les théoriciens, praticiens et surtout les critiques de l’analyse de réseaux, était « que peut-on tirer de bien consistant au niveau analytique de tels calculs complexes ? » ! en bref, pour dire quoi ? bien sûr à part me « prouver » que je pouvais maitriser la théorie des graphes !

L’autre question qui m’a le plus interpelée: qu’apporter de plus à la connaissance du phénomène nationaliste au Maroc?

Et je me suis replongée dans les différentes traces des acteurs que j’étudie (mémoires, autres écrits): Il en ressort une atmosphère de «nationalisme sur fond local». L’histoire du mouvement nationaliste y est partagée entre une «histoire locale» et une «histoire unitaire» et nationale. Chaque ville se voit ainsi érigée par ses natifs devenus nationalistes en premier foyer du nationalisme marocain pour en tirer notoriété et fierté.

Et petit à petit cette problématique du passage du local au national commence à émerger.

Cette réflexion sur la ville et le local m’est venue surtout avec l’expérience de l’Atelier d’anthropologie urbaine de Casablanca (abrité par le Centre Marocain des Science Sociales, université de Casablanca), où j’ai appris à m’intéresser aux processus urbains et aux pratiques de la ville mais aussi à l’importance du descriptif des portraits et des profils. Cette expérience a aussi beaucoup d’effet sur mon style d’écriture. Elle m’a aussi donné l’occasion de découvrir le livre référence de tous les thésards,  H. Becker «Ecrire les sciences sociales» mais aussi Bruno Latour (qui a le plus réfléchi sur les jeux d’échelles).

J’ai aussi changé mes lectures concernant l’histoire du Maroc : je laisse de côté A. Laroui et je commence à lire d’autres auteurs dont principalement Jacques Berque. Même si ce dernier est plus connu pour son travail dans le milieu rural, il a aussi beaucoup travaillé sur l’urbain et les villes. Je cite notamment «Le Maghreb entre deux guerres» et son excellente description de la ville de Fès. C’est de lui que j’ai eu, entre autres, cette idée de documenter le Majliss baladi de Fès.

Progressivement, le puzzle commence à prendre forme  et la problématique d’approcher le processus national à partir du local se consolide. Encore fallait-il la «construire» et surtout la documenter. Après avoir réalisé des entretiens avec certains nationalistes (Hachmi Filali, Abdallah Ibrahim, Mehdi Bennouna…), dont je remercie ici la mémoire, et travaillé sur les écrits et mémoires, je me rends compte tout de même que les éléments que j’avais collectés ne répondaient plus de manière satisfaisante à ce nouveau questionnement du passage du local au national. C’est là que j’ai décidé de travailler sur le journal Essaada (publié en CDrom), avec au passage, une réflexion sur la notion même du «terrain» : documenter les processus étudiés à partir d’un journal était aussi une manière de faire du terrain.

J’ai, par ailleurs, eu l’occasion, d’aller présenter une partie de ce travail à Oran dans le cadre d’un colloque international, juin 2010, qui a porté sur « Regards sur le terrain: le National et le Local en Afrique du Nord ». Cela m’a permis d’organiser mes idées et de constater que ma problématique et mes hypothèses tenaient enfin la route.

Quelques Résultats:

De la description des différents réseaux locaux, j’ai pu dégager la pluralité et diversité des acteurs des espaces-réseaux: de jeunes et d’aînés aux profils divers avec des attitudes plurielles. En plus des jeunes étudiants et d’ouléma qu’on présente souvent comme fer de lance du nationalisme marocain, j’ai pu mettre en avant d’autres acteurs. L’entrée locale a aidé à identifier les édiles autour des municipalités, notamment à Fès. Sociologiquement parlant, ces édiles appartiennent à la notabilité. Catégorie que j’ai tenté de déconstruire.

La pluralité des espaces-réseaux autour desquels et dans lesquels les acteurs sont inscrits est mise en avant. En plus des traditionnels espaces de l’enseignement (Qaraouiyine, , écoles libres), j’ai décrit d’autres espaces: le Majliss baladi; le théâtre; les associations culturelles et sportives, les clubs informels.

Ensuite, la circulation des idées entre les différents réseaux locaux. Ceci amène à l’identité du contenu des actions et des initiatives des acteurs. Toujours dans ce cadre, on peut souligner la «compétition» entre les différentes villes quant à certaines actions (comme le théâtre par exemple).

L’identité des actions est ainsi clairement perceptible dans la thématique de la bienfaisance qui est portée au début par les édiles et les notabilités des différents réseaux. Par la suite, les jeunes s’y adonneront aussi en consacrant les recettes de leurs pièces théâtrales pour venir en aide aux différentes associations de bienfaisance. Cet intérêt pour la bienfaisance ne s’explique pas seulement par le devoir religieux. C’est que des religieux catholiques les ont devancés dans  cette prise en charge des déshérités et mendiants. Il fallait les «récupérer»  au nom de l’Islam. Pour les notabilités, il en va aussi de leur rang dans la société : donner est synonyme de prestige. La publication des listes des donateurs avec la somme d’argent souscrite dans Es Saada participe de cette mise en scène notabilaire.

Signalons aussi l’identité du contenu du réformisme des acteurs. Ce réformisme est clairement en lien avec la femme, la morale publique et l’interdiction de la mixité dans plusieurs espaces. Ce réformisme concerne également les pratiques religieuses, la lutte contre les confréries, la lutte contre les fastes des festivités.

La connexion entre les réseaux locaux se fait via des  acteurs-ponts et des modalités de mise en réseau que j’ai appelés les pré-requis de la fusion à savoir la clarification des concepts et  la confiance et la fidélisation des liens entre les différents acteurs des réseaux locaux. La fusion n’est pas définitive en 1930.

Les processus que j’ai décrits montrent l’ambivalence du passage du local au national. Contrairement à d’autres expériences nationales où les nationalistes prennent un objet local (langue, ou autre) et le consacrent comme étant national. Au Maroc, la construction du national ne retient rien du local au niveau de la construction discursive de la nation.

Perspectives:

Il y en a plusieurs: vérifier mes hypothèses au niveau des autres villes (peut-être que finalement je me trompe et qu’il y a d’autres villes ayant abrité des processus similaires ; restituer les liens entre les grandes villes et les petites et aussi la compagne (comment l’idée nationale s’y est-elle  diffusée?).

Ensuite, cette question de sociologie de bienfaisance et la gestion de la pauvreté dans les villes marocaines et par les notabilités.

Enfin: femmes, genre et nationalisme.

- Fadma Aït Mous

Centre Marocain des Sciences Sociales/CM2S – Université de Casablanca

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